Fini les cônes orange et les chronos à la main. Aujourd’hui, les athlètes s’entraînent avec des capteurs dans les chaussures, des algorithmes dans les veines et des coachs qui parlent en binaire. Bienvenue dans le sport 3.0, où l’intelligence artificielle dicte la performance – et change les règles du jeu.
L’intelligence artificielle a envahi les vestiaires
On l’attendait sur les bancs des traders ou dans les voitures autonomes, mais c’est dans les salles d’entraînement que l’intelligence artificielle (IA) fait aujourd’hui des ravages… positifs. Footballeurs, tennismen, sprinteurs ou nageuses ne s’entraînent plus à l’ancienne. Grâce à la data, aux capteurs biométriques et aux prédictions algorithmiques, les séances sont devenues chirurgicales. Chaque mouvement est analysé, chaque performance décryptée, chaque erreur anticipée.
Prenez un sprinteur de haut niveau : en 2025, il peut courir une série de 100 mètres pendant qu’un logiciel enregistre sa foulée, sa fréquence, l’angle de ses bras, la puissance au sol, et compare tout cela à des milliers de courses stockées dans une base de données. Résultat ? Le coach reçoit instantanément des conseils ultra-ciblés pour corriger le geste et optimiser l’effort. Mieux : l’IA peut prédire les risques de blessure avant même qu’ils ne se matérialisent.
Les coachs ne sont plus seuls dans la salle
Cette révolution technologique ne remplace pas l’humain, mais elle le renforce. Les préparateurs physiques, kinés et entraîneurs disposent aujourd’hui d’outils qu’ils n’auraient même pas rêvé il y a dix ans. En NBA, chaque joueur est suivi par une batterie de capteurs pendant les entraînements et les matchs. À l’INSEP ou à Clairefontaine, des logiciels d’analyse vidéo repèrent automatiquement les schémas de jeu inefficaces ou les temps de réaction trop longs.
Même les amateurs s’y mettent : des applications comme Whoop, STRYD ou Homecourt utilisent l’IA pour proposer un suivi personnalisé aux sportifs du dimanche. Et sur YouTube ou TikTok, des coachs-IA pullulent, proposant des conseils calibrés par machine pour tout – du squat parfait à la meilleure technique de lancer-franc. Le savoir sportif est devenu algorithmique.
Une guerre des données qui change la compétition
Mais cette technologie ne fait pas que bonifier l’entraînement : elle change aussi la compétition. Les clubs, les sélections nationales et même les sponsors se livrent une véritable guerre de la donnée. Ceux qui possèdent les meilleurs outils, les meilleures bases de données et les ingénieurs les plus malins prennent une longueur d’avance.
Dans le football européen, Manchester City est devenu un monstre de l’analyse prédictive. Grâce à des millions de données collectées depuis des années, ils sont capables de recruter des joueurs selon leur profil statistique, d’adapter le plan de jeu en temps réel, et même de modéliser la fatigue de chaque joueur pour éviter les blessures. Un joueur ne joue plus parce qu’il “semble fatigué”, mais parce que son score d’efficacité neuromusculaire est tombé sous 67 %.
Jusqu’où ira l’IA ? Et où s’arrête le sport ?
Face à cette déferlante numérique, une question s’impose : que reste-t-il de l’intuition, du flair, du hasard, de la magie du sport ? Certains y voient une menace. L’ancienne judokate Clarisse Agbégnénou le résumait ainsi : “Un logiciel ne peut pas sentir ce que je ressens sur le tapis.” D’autres, comme le tennisman Novak Djokovic, se félicitent de cette avancée : “L’IA me permet de voir des choses que même mes yeux d’athlète ne détectent pas.”
Il y a aussi la question de l’équité. Tous les athlètes n’ont pas accès aux mêmes outils. Un boxeur africain ou une coureuse sud-américaine n’auront pas les mêmes moyens technologiques qu’un nageur américain sous contrat avec une université dotée d’un labo de recherche. Le risque d’un sport à deux vitesses, entre ultra-connectés et laissés-pour-compte, n’est pas à exclure.
La performance sur-mesure est là. Et elle ne s’en ira pas
Une chose est sûre : l’IA ne repartira pas dans sa boîte. Les jeunes sportifs de demain grandiront avec des jumeaux numériques, des coachs virtuels et des séances calibrées au micron près. Et à l’horizon, on parle déjà d’IA générative qui pourrait simuler des adversaires fictifs, créer des plans de jeu à la volée ou même générer des modèles de récupération individualisés.
Le sport n’a pas fini de se transformer. Et si l’on y perd un peu de romantisme, on y gagne en puissance, en précision, en spectacle. Le muscle est toujours roi, mais le cerveau électronique a pris le pouvoir.