Chaque année, des millions de balles de tennis sont consommées sur les courts du monde entier. Un objet banal en apparence, mais qui concentre à lui seul une bonne part des problématiques environnementales liées à la pratique du tennis. Retour sur une question qui rebondit toujours sans réelle réponse globale.
Une consommation massive et problématique
On estime que plus de 325 millions de balles de tennis sont utilisées chaque année dans le monde. À titre de comparaison, Roland-Garros à lui seul en consomme plus de 60 000 sur la durée du tournoi. Et dans les clubs amateurs, les joueurs changent souvent de balles tous les deux ou trois matchs.
Le souci ? Une balle de tennis est constituée de caoutchouc pressurisé, recouvert de feutre synthétique, un mélange complexe de nylon et de laine. Une fois usée, elle est difficilement recyclable, ne se dégrade pas naturellement, et finit le plus souvent à la poubelle, voire dans les décharges.
Depuis quelques années, certaines fédérations et initiatives privées tentent de limiter l’impact environnemental de ces balles. En France, la FFT a mis en place un programme de collecte avec des boîtes spécifiques installées dans les clubs. Les balles récupérées sont ensuite transformées en matériaux pour les sols sportifs ou les aires de jeux.
Mais ces initiatives restent encore très localisées. Le coût du recyclage est élevé, et la complexité du matériau empêche une réutilisation industrielle à grande échelle. En dehors de quelques rares projets pédagogiques ou artistiques, la plupart des balles usagées terminent leur vie dans un tiroir ou à la poubelle.
Le mirage du tennis écolo
Des startups ont bien tenté de développer des alternatives. Certaines proposent des balles sans pression, qui durent plus longtemps, d’autres utilisent des matériaux partiellement biosourcés. Mais elles peinent à convaincre les joueurs professionnels, qui exigent un rebond précis et une homogénéité parfaite.
L’ITF (Fédération internationale de tennis) impose des normes très strictes sur le poids, la pression et la vitesse de la balle. Résultat : même si des balles dites « écologiques » existent, elles sont aujourd’hui exclues du circuit professionnel, cantonnées à la pratique amateur ou au loisir.
La problématique des balles de tennis est aussi logistique. Pour les tournois du Grand Chelem ou les Masters 1000, les balles sont fabriquées en Asie, transportées par conteneurs vers l’Europe ou les États-Unis, puis acheminées sur les différents lieux de compétition. Un bilan carbone peu reluisant pour un objet si petit.
Certains acteurs, comme la marque Wilson, ont annoncé vouloir relocaliser une partie de leur production. Mais le défi est de taille : cela suppose de repenser toute la chaîne industrielle, des usines aux matériaux.
Le rôle des marques et des joueurs de tennis
Les équipementiers, de leur côté, peinent à adopter une position claire. Ils communiquent volontiers sur des collections de vêtements écoresponsables, mais restent très discrets sur les balles. Les grandes marques comme Dunlop, Babolat, Head ou Wilson continuent de produire en masse sans réelle transparence sur les procédés industriels.
Quant aux joueurs et joueuses, ils commencent timidement à se saisir du sujet. Andy Murray, Naomi Osaka ou Dominic Thiem ont soutenu des campagnes de recyclage. D’autres, comme Ons Jabeur, ont évoqué la possibilité de sensibiliser leurs clubs ou leurs académies à ces questions. Mais dans l’ensemble, le sujet reste peu discuté dans le circuit pro.
Pour réduire l’impact écologique du tennis, il ne suffira pas de collecter quelques balles ici et là. C’est l’ensemble de la filière qu’il faut repenser : de la production à l’utilisation, en passant par la logistique et le traitement en fin de vie. Cela demande une volonté politique des institutions sportives, mais aussi une pression du public et des pratiquants.
Des solutions émergent : balles réutilisables, labels environnementaux pour les fabricants, circuits courts de distribution. Mais pour que ces pistes deviennent la norme, le tennis devra sortir de sa zone de confort. Car derrière la petite balle jaune, c’est une grosse empreinte écologique qui continue de rebondir.
