Depuis plusieurs années, Roland-Garros s’efforce de réduire son empreinte écologique. Si les ambitions affichées par la Fédération française de tennis sont réelles, les défis à relever restent nombreux. Tour d’horizon d’un tournoi en pleine mutation.
Un virage environnemental assumé à Roland-Garros
Considéré comme l’un des quatre tournois du Grand Chelem, Roland-Garros bénéficie d’une visibilité mondiale. Ce poids médiatique confère au tournoi parisien une responsabilité supplémentaire : montrer l’exemple en matière d’écoresponsabilité. Depuis 2019, la FFT a adopté une politique de développement durable avec pour ambition de rendre Roland-Garros neutre en carbone d’ici 2030.
Cette démarche s’est traduite par plusieurs actions concrètes : suppression des bouteilles plastiques pour les joueurs, installation de fontaines à eau, recyclage systématisé des déchets, utilisation de véhicules électriques et gestion optimisée des transports des spectateurs. Des efforts salués mais encore jugés timides par certaines ONG.
Des infrastructures plus vertes
Le chantier de modernisation du stade a également intégré des considérations environnementales. Le nouveau court Simonne-Mathieu, par exemple, est entouré de serres et de jardins botaniques. Il a été conçu pour s’intégrer harmonieusement dans l’environnement du jardin des Serres d’Auteuil. Les matériaux utilisés sont plus durables, l’isolation thermique améliorée, et des panneaux solaires ont été installés sur certains toits.
Par ailleurs, la toiture du court Philippe-Chatrier, inaugurée en 2020, bien que critiquée pour son coût et son impact visuel, permet une meilleure gestion des interruptions de jeu, ce qui optimise les plannings et réduit le gaspillage énergétique lié aux reports et reprogrammations.
Le casse-tête des déplacements
Mais l’un des points les plus sensibles demeure le transport des joueurs, du staff et des spectateurs. Si des navettes électriques sont proposées, et que les partenariats avec des entreprises comme Renault visent à promouvoir des véhicules hybrides ou 100 % électriques, le poids écologique des trajets aériens reste énorme. La FFT encourage l’utilisation des transports en commun et a même instauré des primes pour les spectateurs venant en vélo, mais cela reste marginal face aux dizaines de milliers de visiteurs quotidiens, souvent venus de loin.
Roland-Garros a le mérite d’initier un mouvement dans un sport longtemps resté à l’écart des débats écologiques. À l’instar du tournoi australien qui a instauré des protocoles anti-chaleur en réponse aux incendies et vagues de chaleur, ou de Wimbledon qui mise sur une logistique circulaire pour ses balles et ses produits alimentaires, le tournoi parisien cherche à inspirer.
Le circuit ATP et WTA a d’ailleurs annoncé la création d’un « sustainability tour » qui récompensera les tournois les plus engagés sur le plan environnemental. Roland-Garros ambitionne de figurer en tête de ce classement d’ici quelques années.
Les limites du greenwashing à Roland-Garros
Toutefois, certains dénoncent une communication trop optimiste de la part des organisateurs. La multiplication des panneaux solaires ou des gobelets réutilisables ne doit pas masquer le fait que l’empreinte carbone globale du tournoi reste importante. En 2022, la FFT reconnaissait elle-même un bilan de 156 000 tonnes de CO2 pour l’événement, en majorité dues aux transports internationaux.
Des critiques pointent également le sponsoring de certaines entreprises peu exemplaires sur le plan écologique, ou la surconsommation générée par la boutique officielle, malgré des efforts sur les textiles recyclés.
Le véritable enjeu réside dans la capacité à transformer l’ensemble du tennis professionnel vers une logique plus durable. Cela suppose une révision du calendrier mondial – très gourmand en trajets longue distance – et une répartition plus locale des compétitions. La FFT, à travers son tournoi phare, veut jouer un rôle de pionnier, mais la route reste longue.
Il faudra aussi embarquer les joueurs et joueuses dans ce virage, en les sensibilisant aux bonnes pratiques, en les incitant à compenser leurs déplacements et en valorisant ceux qui s’engagent. Car c’est toute l’image du tennis qui est aujourd’hui en jeu : un sport d’élite peut-il se transformer en modèle d’écologie responsable ?
