On la relègue souvent en bas des emplois du temps, comme une respiration entre deux « vraies matières ». Pourtant, la pratique sportive à l’école joue un rôle majeur dans le développement des enfants et des adolescents. Mieux structurée, mieux financée, elle pourrait devenir un pilier éducatif au même titre que le français ou les mathématiques.
Le sport, un outil de construction personnelle à l’école
Dès le plus jeune âge, le sport favorise la motricité, la coordination, l’endurance. Mais au-delà des bénéfices physiques, il développe des qualités sociales et mentales essentielles : l’esprit d’équipe, le respect des règles, la gestion de la frustration, la capacité à coopérer ou à se dépasser.
Dans un cadre bienveillant, il peut même permettre à certains élèves en difficulté de reprendre confiance. Il offre des occasions de réussite en dehors des performances scolaires classiques. Et pour des jeunes en perte de repères, il devient un espace de stabilisation, voire de reconstruction.
L’éducation physique, parent pauvre de l’école
Malgré ces bénéfices largement documentés, l’enseignement de l’éducation physique et sportive (EPS) reste sous-évalué. En France, les élèves du secondaire bénéficient en moyenne de 3 heures par semaine d’EPS — une durée stable mais souvent grignotée par les autres matières ou par les contraintes logistiques (manque d’équipements, absence de remplaçants…).
L’EPS pâtit encore d’une vision utilitaire : on y bouge pour se détendre, mais on n’y apprendrait rien de sérieux. Ce stéréotype nuit à sa reconnaissance et à son attractivité, alors même que de nombreuses études montrent que l’activité physique améliore la concentration, l’attention et le climat scolaire.
Le sport scolaire, vecteur d’égalité… ou de discrimination ?
Théoriquement, le sport scolaire est un outil d’égalisation des chances. Il ne dépend ni du milieu social, ni du niveau académique, ni du capital culturel des familles. Mais dans les faits, des inégalités d’accès persistent. Les établissements des quartiers populaires manquent souvent d’infrastructures de qualité. Les filles, surtout à l’adolescence, décrochent plus que les garçons.
Des efforts sont faits pour inverser la tendance. Des programmes spécifiques favorisent l’inclusion des jeunes en situation de handicap. L’UNSS (Union nationale du sport scolaire) développe des compétitions mixtes, des événements solidaires et des formations au leadership par le sport. Mais le manque de moyens freine leur déploiement à grande échelle.
Une réponse concrète aux enjeux contemporains grâce à l’école
À l’heure où les jeunes passent de plus en plus de temps assis, devant des écrans, le sport devient un enjeu de santé publique. L’OMS recommande une heure d’activité physique par jour pour les enfants, un objectif très loin d’être atteint. L’école a donc un rôle crucial à jouer pour recréer une culture du mouvement.
Mais le sport est aussi un terrain d’expérimentation face à d’autres défis contemporains : l’apprentissage du vivre-ensemble, la lutte contre le harcèlement, la gestion du stress, la sensibilisation à l’écologie (à travers des sports de pleine nature, par exemple). C’est un levier global de transformation éducative.
Former, accompagner, reconnaître
Pour que le sport joue pleinement son rôle dans l’éducation, il faut revaloriser la place des professeurs d’EPS, investir dans les infrastructures, créer plus de passerelles entre l’école et le tissu associatif sportif. La coordination entre ministères (Éducation, Sports, Santé) reste trop faible.
L’idée d’un « parcours éducatif sportif » fait son chemin : un suivi régulier de la pratique physique, une meilleure articulation entre sport scolaire et clubs, des évaluations qui prennent en compte les progrès, pas seulement la performance brute. Certains pays, comme la Finlande ou le Canada, en font déjà des piliers de leur système éducatif.
Conclusion : et si on changeait de regard ?
Le sport à l’école n’est pas un luxe. C’est une nécessité éducative, sociale, sanitaire et humaine. Il mérite d’être pensé non pas comme une activité à la marge, mais comme une composante centrale de la formation des citoyens de demain.
Plutôt que de se demander ce que le sport fait perdre à l’école (du temps, de la rigueur), il est temps de voir ce qu’il lui apporte : de la cohésion, de la confiance, de la vitalité, de l’ouverture. Et peut-être, un peu plus d’envie d’apprendre.
