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Tournois écoresponsables : quand le tennis devient un laboratoire

Davidovich

Davidovich

La saison tennistique est ponctuée de tournois prestigieux qui mobilisent des millions de spectateurs, de joueurs, de partenaires et de bénévoles. Mais derrière la célébration sportive, ces événements génèrent une empreinte carbone significative, liée aux transports, à la construction des infrastructures temporaires, à la gestion des déchets ou encore à la consommation énergétique des enceintes. Conscientes de cette responsabilité, plusieurs compétitions se positionnent comme acteurs du changement vers des tournois écoresponsables, tentant d’intégrer la durabilité dans toutes les dimensions de leur organisation.

Roland-Garros, pionnier en France des tournois écoresponsables

Parmi les tournois du Grand Chelem, Roland-Garros a longtemps été en avance sur les enjeux écologiques. Dès 2008, la FFT lançait une politique de développement durable autour de son tournoi phare. Cette politique a donné naissance à une stratégie en trois axes : réduction des impacts, sensibilisation du public et innovation.

Parmi les actions concrètes : une collecte systématique des déchets, une politique stricte de recyclage, des partenariats avec des ONG pour récupérer les surplus alimentaires, et des efforts de végétalisation des espaces. Les rénovations du site ont également intégré une dimension écologique, avec par exemple la toiture végétalisée du court Suzanne-Lenglen ou l’utilisation d’énergies renouvelables.

En 2022, Roland-Garros s’est fixé un objectif clair : réduire de 30% son empreinte carbone d’ici à 2030. Cela passe par des transports doux incités pour les spectateurs, une rationalisation des déplacements des équipes, mais aussi des menus plus végétariens dans les espaces de restauration. Une démarche qui vise à faire du tournoi une référence mondiale en matière d’événement sportif durable.

Wimbledon et l’écologie « chic »

Côté britannique, Wimbledon a pris la mesure de son impact environnemental plus récemment, mais avec ambition. En 2019, le tournoi a publié un plan de développement durable à horizon 2030, avec plusieurs leviers : réduction des plastiques à usage unique, amélioration de la gestion des eaux pluviales, énergie verte, etc.

La spécificité de Wimbledon réside dans son patrimoine naturel : les terrains sont entourés de jardins, d’arbres et d’habitats protégés. Le tournoi met un point d’honneur à préserver cette biodiversité, en limitant l’artificialisation des sols et en favorisant la pollinisation autour des courts.

Par ailleurs, le tournoi s’efforce de compenser ses émissions incompressibles par des programmes de reforestation ou de soutien à des projets de transition énergétique, en Angleterre comme à l’étranger. Une approche mêlant tradition et modernité, fidèle à l’esprit du All England Club.

L’Open d’Australie et la résilience climatique

À Melbourne, c’est la vulnérabilité climatique qui pousse les organisateurs à repenser leur tournoi. Les vagues de chaleur à répétition, les incendies de forêt ou les tempêtes imprévues ont des conséquences directes sur la logistique et la santé des joueurs.

En réponse, Tennis Australia a initié plusieurs projets de modernisation écologique : panneaux solaires sur les installations, systèmes de récupération des eaux, réduction du plastique, navettes électriques… L’accent est mis sur la résilience, c’est-à-dire la capacité à maintenir l’événement malgré les bouleversements climatiques.

L’Open d’Australie est également le premier tournoi à avoir lancé un bilan carbone détaillé de son édition 2023, publié en open data, pour permettre aux chercheurs, ONG et citoyens de suivre les progrès et proposer des améliorations.

Les tournois écoresponsables, challengers à la manœuvre

L’écologie ne concerne pas uniquement les grandes compétitions. Des tournois de niveau Challenger ou ITF se mobilisent à leur échelle, parfois avec des moyens limités, mais un engagement fort. C’est le cas de l’Open de Rennes, qui depuis 2021 a adopté une charte écoresponsable, avec circuits courts alimentaires, compensation carbone, accueil des joueurs en mobilités douces et ateliers de sensibilisation pour les scolaires.

Ces formats plus modestes permettent une plus grande agilité, favorisant les expérimentations : toilettes sèches, signalétique éco-conçue, zéro plastique… Un laboratoire idéal pour tester des pratiques qui, demain, pourront s’appliquer à des épreuves majeures.

Un public plus attentif… et plus exigeant

Côté spectateurs, les attentes changent. Les fans de tennis sont de plus en plus nombreux à s’interroger sur l’impact environnemental des tournois qu’ils fréquentent. Le tri des déchets, l’offre végétarienne, l’utilisation de transports propres ou les actions de compensation carbone figurent parmi les critères qui influencent leur perception d’un événement.

Les tournois doivent désormais allier spectacle et responsabilité, sous peine d’être pointés du doigt. Cette évolution pousse les organisateurs à s’associer avec des ONG, des entreprises de la transition ou même des artistes pour communiquer autrement sur leur engagement écologique.

Un filet à ne pas laisser tomber

Si les initiatives se multiplient, il reste des marges de progression : le transport aérien des joueurs, les tournées internationales, l’usage des climatiseurs dans les stades, ou encore la production massive de merchandising peu durable. Le sport, en particulier dans sa dimension événementielle, devra apprendre à conjuguer performance et sobriété.

Mais la dynamique est enclenchée. Le tennis, sport global et influent, a une opportunité unique d’inspirer d’autres disciplines. En devenant une vitrine de l’écologie en mouvement, les tournois peuvent transformer chaque match en engagement, chaque victoire en signal fort.