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Le recyclage des balles de tennis

US Open

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Sur un court de tennis, les balles sont des consommables rapides. Elles perdent en pression, en rebond, en feutrage, et deviennent vite inutilisables à haut niveau. Même chez les amateurs, elles sont fréquemment remplacées, reléguées au fond d’un sac, oubliées ou tout simplement jetées. En France, on estime qu’environ 14 millions de balles sont utilisées chaque année, avec un impact environnemental non négligeable : caoutchouc synthétique, colle, gaz sous pression, feutre synthétique… Autant de composants qui posent problème en fin de vie. Pourtant, le recyclage des balles de tennis existe et pourrait devenir un pilier de la transition écologique du sport.

Le recyclage difficile d’un objet mythique

La balle de tennis n’est pas un objet anodin. Elle est composée de plusieurs couches : une enveloppe de caoutchouc, un noyau pressurisé rempli d’un gaz spécial, et un revêtement en feutre souvent composé de laine et de fibres synthétiques. Cette complexité rend son recyclage difficile, car il est coûteux de séparer ces composants.

Pendant longtemps, ces contraintes techniques ont conduit à l’abandon pur et simple de toute tentative de revalorisation. Mais depuis une dizaine d’années, des programmes voient le jour, à l’initiative de fédérations, d’associations ou d’entreprises spécialisées dans le recyclage. En France, la Fédération Française de Tennis (FFT) a lancé dès 2009 une filière dédiée, avec l’appui de l’éco-organisme Balle Jaune.

Le programme Balle Jaune : un pionnier français du recyclage

Le programme Balle Jaune, porté par la FFT, permet à des clubs partout en France de collecter les balles usagées dans des bornes spéciales. Ces balles sont ensuite envoyées à un centre de tri spécialisé, où elles sont broyées puis revalorisées. Le caoutchouc est notamment utilisé pour fabriquer des sols sportifs souples, comme des aires de jeux ou des revêtements pour les terrains de sport en milieu scolaire.

Chaque année, près de 1,5 million de balles sont collectées dans ce cadre, ce qui reste modeste au regard des volumes totaux utilisés. Mais le dispositif est en expansion constante, et sa visibilité auprès des clubs grandit. Certains départements en font une priorité, et des opérations de communication locales sensibilisent les licenciés. La FFT envisage d’ailleurs d’élargir le modèle pour atteindre, à terme, une collecte systématique dans tous les clubs affiliés.

Des innovations pour prolonger la vie des balles

Outre le recyclage, plusieurs start-up s’attaquent au problème en amont : comment prolonger la durée de vie des balles ? La société française Rebond a mis au point une machine de regonflage de balles, permettant de leur redonner une pression optimale pour quelques matchs supplémentaires. Utilisée dans certains clubs pilotes, cette innovation ouvre une nouvelle voie : celle de la réutilisation plutôt que du jet systématique.

D’autres entreprises comme GreenSet ou Triniti (chez Wilson) proposent des balles à technologie prolongée, conçues pour garder leurs propriétés plus longtemps, réduisant ainsi le besoin de remplacement fréquent. Ces solutions s’adressent pour l’instant à un public sensibilisé, mais leur coût supplémentaire reste un frein à leur généralisation.

Le rôle clé des clubs et des joueurs

La réussite de ces initiatives dépend largement de l’implication des clubs et des pratiquants. Or, si certaines structures ont adopté les bacs de récupération et les machines de regonflage avec enthousiasme, d’autres peinent à franchir le pas, faute d’informations ou de moyens logistiques.

La sensibilisation est donc cruciale. Des affiches, des campagnes numériques, des opérations « green tennis » sont organisées localement pour changer les habitudes des joueurs, notamment chez les jeunes. Le message est simple : ne pas jeter ses balles, mais leur donner une seconde vie. À l’image des collectes de bouchons ou de piles, ces gestes peuvent devenir automatiques dans les clubs les plus actifs.

L’Europe et l’international : vers une harmonisation ?

La France fait figure de modèle, mais elle n’est pas la seule à s’attaquer au problème. En Espagne, la marque GreenBalls développe un programme similaire de collecte et de revalorisation. En Italie, plusieurs clubs ont noué des partenariats avec des ONG pour envoyer les balles usagées dans des écoles défavorisées. Aux États-Unis, des initiatives de recyclage apparaissent dans certaines ligues universitaires, tandis que l’USTA commence à réfléchir à un programme national.

Il manque encore une coordination internationale pour mutualiser les savoir-faire et imposer des standards à l’industrie. Une norme ISO sur le recyclage des balles de tennis pourrait voir le jour dans les années à venir. Les grands tournois comme Roland-Garros ou Wimbledon pourraient également jouer un rôle d’exemplarité en mettant en place des filières complètes de gestion des déchets.

Une balle à effet pour l’écologie

Le tennis, sport emblématique et populaire, a le pouvoir de lancer des dynamiques vertueuses. Le recyclage des balles, bien que technique et logistique, symbolise parfaitement le potentiel de transformation du sport. En responsabilisant ses pratiquants, en innovant dans ses produits et en structurant ses filières de traitement, la discipline pourrait devenir l’un des fers de lance du sport durable.

Mais cette révolution ne pourra se faire sans un engagement clair de toutes les parties : joueurs, clubs, marques et institutions. Chaque balle compte — et pour l’environnement, c’est peut-être le point décisif.