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L’équipement durable des joueurs : un enjeu croissant du tennis éco-responsable

Davidovich

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Sur un court de tennis, chaque détail compte : le cordage de la raquette, l’adhérence de la semelle, le tissu de la tenue. Ces équipements, essentiels à la performance des joueurs professionnels et amateurs, sont également de plus en plus scrutés sous l’angle de leur impact environnemental. Fabriqués en grande partie à base de matières synthétiques issues de la pétrochimie, transportés par avion, produits à l’autre bout du monde, les articles de sport ont un coût carbone élevé. Mais les choses évoluent vers le principe de l’équipement durable. Poussés par les sportifs eux-mêmes, les équipementiers du tennis amorcent une transition vers des produits plus durables.

Des raquettes toujours plus techniques, mais encore polluantes

La fabrication d’une raquette de tennis implique des matériaux composites complexes : fibres de carbone, résine époxy, titane… Ces matériaux assurent légèreté, rigidité et puissance, mais sont très énergivores à produire. Le recyclage d’une raquette est quasiment impossible aujourd’hui, en raison de la difficulté à séparer les différentes couches de matériaux.

Pourtant, quelques marques s’engagent dans une démarche plus responsable. Wilson, par exemple, a lancé en 2022 la première raquette « éco-conçue », la Wilson Eco Pro Staff, fabriquée avec des matériaux partiellement recyclés, un emballage compostable et un bilan carbone compensé. Un geste symbolique, mais encore marginal face à la production globale. D’autres marques comme Head et Yonex explorent des filières de production plus sobres, mais la compétition technologique reste forte, parfois au détriment de l’écologie.

Les cordages : un objet de gaspillage massif

Les cordages, en nylon, polyester ou boyau naturel, sont remplacés régulièrement, parfois à chaque match au plus haut niveau. Leur fabrication est loin d’être vertueuse, et leur durée de vie très courte. Certaines marques proposent désormais des cordages en matériaux recyclés, ou utilisent des procédés de fabrication moins gourmands en eau et énergie. Mais la généralisation de ces produits demande encore un effort collectif de la part des clubs, des coachs et des joueurs eux-mêmes.

Des vêtements en fibres recyclées et naturelles : ancrage  dans l’équipement durable

Sur le terrain de l’équipement vestimentaire, les progrès sont plus visibles. Adidas, Nike, Asics ou Lacoste intègrent dans leurs collections des fibres recyclées (issues de bouteilles plastiques notamment) ou des fibres naturelles comme le coton bio. Des gammes entières sont désormais labellisées « écoresponsables », même si certains experts pointent du doigt le risque de greenwashing si les informations sur la chaîne de production ne sont pas transparentes.

Des initiatives comme celle de Stella McCartney avec Adidas, qui a habillé plusieurs joueuses du circuit avec des tenues fabriquées à partir de déchets plastiques repêchés dans les océans, ont eu un fort impact médiatique. Mais là encore, la logique reste majoritairement marketing. Une transformation systémique supposerait de relocaliser la production, d’améliorer les conditions sociales dans les usines, et de prolonger la durée de vie des vêtements.

Les chaussures : casse-tête écologique de l’équipement durable

Les chaussures de tennis représentent un vrai défi. Composées de nombreuses pièces et matériaux, elles sont très difficiles à recycler. Usées rapidement sur surface dure, elles sont rarement réutilisées ou réparées. Asics a récemment mis sur le marché des modèles fabriqués avec jusqu’à 90 % de matériaux recyclés, et réduisant leur empreinte carbone de 20 % par rapport aux modèles classiques. D’autres marques s’engagent à réduire la quantité de colle ou à améliorer la recyclabilité des semelles.

Des projets de collecte et de recyclage de chaussures usagées sont également testés dans plusieurs pays. En France, certaines ligues régionales de tennis lancent des campagnes de récupération de baskets usées, en partenariat avec des recycleurs ou des ONG.

Vers une nouvelle consommation des joueurs

Au-delà de l’offre industrielle, la transition écologique passe aussi par une prise de conscience des pratiquants. De plus en plus de joueurs amateurs s’orientent vers des marques éthiques, évitent d’acheter trop fréquemment, et cherchent à prolonger la durée de vie de leur matériel.

Certains choisissent des balles de tennis rechargeables, comme celles proposées par l’entreprise française Rebond, qui a mis au point un procédé de regonflage des balles usées pour éviter le gaspillage. D’autres initiatives visent à créer des clubs écoresponsables, où l’on échange le matériel entre membres ou où des ateliers de réparation sont mis à disposition.

L’exemple des pros : un levier d’influence

Les stars du tennis peuvent jouer un rôle déterminant dans cette transition. Des joueurs comme Dominic Thiem ou Ons Jabeur ont récemment pris la parole sur leur volonté de réduire leur empreinte environnementale. D’autres soutiennent des marques engagées ou s’impliquent dans des fondations écologiques.

Des plateformes comme We Are Tennis de BNP Paribas mettent en lumière ces démarches. Mais pour qu’elles deviennent la norme, il faudra que les instances du tennis (ATP, WTA, ITF) s’emparent du sujet de manière plus structurée, en intégrant par exemple des critères écologiques dans les contrats d’équipement ou les règlements de tournoi.

Conclusion : vers une filière éco-conçue ?

L’équipement des joueurs est à la croisée des chemins. Encore largement dominé par des produits peu durables, le secteur commence à évoluer sous la pression des consommateurs, des joueurs et des ONG. Pour que cette mutation soit réelle et profonde, il faudra repousser les limites technologiques, mais aussi interroger nos habitudes de consommation dans le sport. Le tennis, sport d’élégance et d’innovation, peut être un modèle en matière d’équipement durable — à condition d’en faire une vraie priorité.