Le tennis professionnel ne se limite pas aux compétitions spectaculaires ni aux exploits sportifs. En coulisses, les infrastructures qui accueillent les tournois jouent un rôle essentiel dans l’empreinte écologique du sport. Des courts aux tribunes, des vestiaires aux restaurants, en passant par les systèmes de climatisation ou d’éclairage, tout est potentiellement source d’émissions carbone et de gaspillage énergétique. Dans un monde confronté à l’urgence climatique, la transition verte des infrastructures tennistiques devient une priorité pour les organisateurs et les fédérations.
Des stades qui polluent beaucoup trop
Un grand tournoi de tennis peut accueillir plusieurs dizaines de milliers de spectateurs chaque jour. Cela nécessite des infrastructures lourdes : parkings, systèmes d’éclairage puissants, climatisation, restauration, logistique, assainissement, etc. Autant d’éléments qui génèrent une importante consommation d’énergie et de ressources.
Certaines installations historiques, construites il y a plusieurs décennies, n’ont pas été pensées dans une logique durable. Matériaux peu isolants, fuites thermiques, consommation démesurée d’eau pour l’arrosage des courts : les failles sont nombreuses. À cela s’ajoute souvent une gestion inefficace des déchets, peu de recours aux énergies renouvelables, et des rénovations coûteuses qui ignorent encore parfois les principes de l’écoconstruction.
Le modèle Roland-Garros : entre transition verte et durabilité
À Paris, le chantier de modernisation de Roland-Garros a intégré une dimension environnementale dès sa conception. Les nouveaux bâtiments du site – comme le court Philippe-Chatrier ou le court Simonne-Mathieu – sont labellisés Haute Qualité Environnementale (HQE). Ils ont été construits en limitant l’usage du béton au profit du bois, avec une isolation renforcée et un éclairage entièrement LED.
Le court Simonne-Mathieu est même intégré au sein des serres du jardin botanique de l’Auteuil, et son toit est recouvert de végétation pour réduire l’effet d’îlot de chaleur. Quant au système d’arrosage des courts en terre battue, il fonctionne en partie grâce à de l’eau de pluie collectée et filtrée.
Ces efforts sont reconnus comme exemplaires par les experts du développement durable dans le sport. Ils montrent qu’un grand projet architectural peut allier performance, esthétique et responsabilité écologique.
Dubaï, Miami, Tokyo : vers des constructions plus sobres
D’autres projets récents à travers le monde commencent à intégrer les critères écologiques dès leur conception. Le Dubai Duty Free Tennis Stadium a modernisé son système d’éclairage en LED et installé des dispositifs de climatisation plus économes. Le tournoi de Miami, quant à lui, a reconverti une partie du Hard Rock Stadium en espaces temporaires pour limiter les coûts environnementaux.
À Tokyo, le centre Ariake Coliseum a bénéficié de rénovations en amont des Jeux olympiques de 2021 : panneaux photovoltaïques, toitures rétractables peu énergivores, systèmes de récupération des eaux de pluie. Dans tous ces cas, l’innovation technologique est mise au service de la réduction d’impact environnemental.
Des matériaux plus responsables pour les courts
Un autre levier de transformation concerne les matériaux utilisés pour la surface des courts. Si les courts en terre battue ou en gazon naturel nécessitent de l’entretien, ils sont souvent plus écologiques que les surfaces synthétiques traditionnelles, souvent dérivées du pétrole.
Des entreprises innovent en proposant des résines biosourcées pour les courts en dur, ou encore des surfaces recyclables à base de caoutchouc récupéré. En Suède, des clubs amateurs ont testé des courts à base de matériaux composites recyclés, avec un bon retour des joueurs sur la qualité du rebond et la durabilité.
L’éco-rénovation des clubs amateurs
La question de l’impact écologique ne concerne pas que les grandes enceintes. Dans le monde amateur, des milliers de clubs disposent de structures vieillissantes qui pourraient bénéficier d’une rénovation écoresponsable. Isolation des bâtiments, mise en place de panneaux solaires, remplacement des éclairages, mise aux normes des systèmes d’eau : autant d’actions simples qui permettent de réduire la facture énergétique et les émissions de CO₂.
En France, la FFT a lancé un plan d’aide pour accompagner les clubs dans ces démarches, avec des subventions à la clé. En Allemagne, des fédérations régionales proposent des formations aux responsables de clubs pour intégrer les bonnes pratiques de la construction durable.
Vers une transition verte mondiale ?
Si les initiatives sont nombreuses, elles manquent encore d’un cadre global. Une norme internationale pourrait être imaginée pour certifier les infrastructures tennistiques sur le plan écologique, à l’image de ce qui existe dans l’immobilier ou les événements culturels.
L’ATP et la WTA pourraient imposer à moyen terme une charte verte obligatoire pour tous les tournois du circuit, assortie de contrôles et d’audits réguliers. Ce serait un levier puissant pour accélérer la transition du secteur.
Construire le tennis du futur
Le tennis ne pourra pas prétendre à une réelle transformation écologique sans repenser en profondeur ses lieux de pratique. Stades, courts, vestiaires, buvettes : chaque mètre carré compte. En engageant une modernisation responsable de ses infrastructures, le tennis montre qu’il est possible de allier excellence sportive et sobriété environnementale.
C’est un investissement pour le futur, mais aussi une exigence pour que le sport blanc reste en phase avec les défis climatiques du siècle.
