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Que deviennent les maillots et crampons usés ?

Manchester United

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Le gâchis encore trop discret des crampons

Dans l’imaginaire collectif, le sport est souvent associé à l’effort, à la rigueur et à la performance. Mais derrière l’éclat des compétitions, un secteur génère des tonnes de déchets chaque année. Maillots, crampons, chaussures, ballons, équipements divers… Que deviennent ces objets une fois usés ou démodés ? Longtemps relégué au second plan, le sujet du recyclage dans le sport commence à émerger, poussé par une conscience écologique qui touche désormais toutes les sphères de la société.

Les chiffres donnent le vertige. Selon une estimation de l’ONG Fair Sport, l’industrie du sport produit environ 12 millions de tonnes de textiles techniques chaque année à l’échelle mondiale. Entre le renouvellement incessant des équipements professionnels, la production de masse pour les fans, et l’usage intensif de plastiques et de fibres synthétiques, le bilan environnemental est lourd.

Des matériaux difficiles à revaloriser

La principale difficulté réside dans la composition même des équipements sportifs. Un maillot est rarement fait d’un seul tissu. Il combine souvent polyester, élasthanne, nylon et traitements chimiques pour résister à la sueur, au lavage et aux UV. Idem pour les chaussures de sport, qui mêlent semelles en caoutchouc, mousse EVA, colle industrielle et parfois fibres de carbone.

Cette complexité rend leur recyclage particulièrement ardu. Il ne s’agit pas seulement de trier, mais de déconstruire l’objet pour en séparer les composants. Une opération coûteuse, souvent incompatible avec les logiques de rentabilité. Résultat : la majorité de ces produits finissent en décharge ou sont incinérés, au détriment de l’environnement.

Recycler les crampons ou les donner ?

Heureusement, des pistes se dessinent. Plusieurs équipementiers comme Adidas ou Decathlon ont lancé des gammes partiellement recyclables ou conçues à partir de matériaux recyclés. Le projet « Futurecraft Loop » d’Adidas ambitionne de créer des chaussures de sport intégralement recyclables. Nike, de son côté, utilise déjà ses chutes de production pour fabriquer des terrains de sport synthétiques via son programme « Nike Grind ».

En France, l’éco-organisme Ecologic a lancé en 2023 un programme expérimental de collecte des articles de sport usagés dans plusieurs régions. En parallèle, la Fédération Française de Cyclisme s’est associée à des startups pour reconditionner les équipements des clubs amateurs. Un maillot ou un casque qui change de propriétaire plutôt que de finir à la poubelle, voilà un changement de paradigme qui fait sens.

Clubs et fédérations : l’exemple à donner

Au niveau professionnel, certains clubs commencent à montrer l’exemple. L’Olympique Lyonnais a mis en place une politique de réemploi pour les maillots non utilisés, redistribués à des associations ou transformés en produits dérivés. Le Stade Toulousain, dans le rugby, collecte les crampons usés pour en faire des revêtements de sol. Des gestes symboliques, mais qui s’inscrivent dans une volonté plus large de réduire l’empreinte environnementale du sport.

La responsabilité des grandes fédérations sportives est aussi engagée. Dans leurs appels d’offres pour les équipements, certaines exigent désormais une part minimale de matériaux recyclés ou un engagement sur la revalorisation en fin de vie. La Fédération Internationale de Ski, par exemple, impose à ses partenaires de proposer des solutions de recyclage pour les combinaisons usées. Une évolution indispensable dans une discipline où les vêtements sont renouvelés chaque saison.

Les supporters ont aussi un rôle à jouer

Mais le défi ne concerne pas que les acteurs du sport professionnel. Les amateurs, les licenciés, les supporters peuvent eux aussi adopter une démarche plus responsable. Donner au lieu de jeter, réparer au lieu de remplacer, choisir des marques écoresponsables… Autant de gestes simples mais efficaces pour allonger la durée de vie des équipements.

Le succès croissant des plateformes de seconde main spécialisées dans le sport (comme « TrocSport » ou « Sporteed ») montre que la demande existe. Les clubs amateurs, eux aussi, se tournent de plus en plus vers des systèmes de bourse ou de troc entre membres.

Une économie circulaire à inventer pour des crampons plus verts

À terme, c’est tout un modèle de production et de consommation qui est à réinventer dans le monde du sport. Passer d’une logique linéaire (produire, consommer, jeter) à une économie circulaire où chaque objet a plusieurs vies. Cela implique une transformation industrielle, mais aussi culturelle.

Car recycler dans le sport, ce n’est pas seulement une question technique. C’est un engagement éthique. C’est reconnaître que la performance ne doit plus se faire au détriment de la planète. Et c’est, surtout, une formidable occasion de faire du sport un vecteur de transition écologique.