Alors que le Tour de France féminin vient de s’achever, un débat anime le monde du vélo : la perte de poids et la maigreur des cyclistes. La question a été soulevée par une interview de la Française Cédrine Kerbaol dans les colonnes de L’Humanité, avant la sixième étape de la Grande Boucle féminine. Depuis, plusieurs athlètes se sont prononcés, dont Pauline Ferrand-Prévôt, vainqueure du Tour cette année.
Le Tour de France Femmes 2025 a démarré le 26 juillet à Vannes et a pris fin le 3 août à Châtel. Pauline Ferrand-Prévot (Visma Lease a Bike) s’est imposée à l’issue des 9 étapes de la course, signant ainsi la première victoire d’une Française sur un grand tour depuis le Tour d’Espagne 1995. Durant la compétition, la cycliste de 33 ans a paru amaigrie, comme beaucoup d’autres coureuses, suscitant des interrogations et des inquiétudes.
Cédrine Kerbaol alerte sur l’extrême maigreur des cyclistes féminins
Mais c’est une interview de la Française Cédrine Kerbaol (EF Éducation) dans les colonnes de L’Humanité, le mercredi 30 juillet, qui a fait naître des inquiétudes autour de la tendance du peloton féminin à vouloir perdre du poids. La Bretonne a déclaré qu’en raison des enjeux du Tour de France, « tout le monde veut progresser plus vite, plus fort, avoir plus de watts, être plus légère…Sauf que c’est un process tout ça ». Selon elle, c’est devenu la mode, ces dernières années, de compter chaque gramme dans les assiettes, ce qui est dangereux. « Il ne faut pas qu’on tombe dans une forme de déshumanisation et d’infantilisation », alerte la grimpeuse de 24 ans.
Le Tour de France, une période de grande visibilité
Cédrine Kerbaol rappelle qu’avant d’être des athlètes, elles sont des femmes et que leur santé compte pour maintenant et pour le futur. Elle trouve terrible tout ce qui se passe en ce moment pour des questions de performance. Kerbaol estime par ailleurs que la situation n’est pas tolérable d’autant que le Tour constitue « une période de plus grande visibilité pendant laquelle « les jeunes filles qui essaient de performer vont les prendre pour exemple ». La diététicienne de formation précise que les coureuses des meilleures équipes sont encadrées par des nutritionnistes ou des médecins. Ce qui n’est pas le cas de toutes une série de cyclistes qui débutent.
« Pas 100% sain », mais une exigence du sport de haut niveau
Interrogée sur le sujet, la Française Pauline Ferrand-Prévot a reconnu avoir perdu quatre kilos, entre sa victoire lors de Paris-Roubaix et le départ du Tour de France. Elle assure toutefois que cette forme physique reste exceptionnelle et n’est que pour la Grande Boucle. La vainqueure du Tour de France Femmes 2025 a également admis que ce choix n’était pas « 100% sain », mais que c’était hélas une exigence du sport de haut niveau. Pour sa part, la Néerlandaise Demi Vollering (FDJ-Suez, 28 ans), 2e du Tour de France Femmes, a déclaré qu’« il n’est pas nécessaire d’être super maigre pour gagner » et qu’on peut le faire avec un poids raisonnable.
Kerbaol créé un compte Instagram pour lutter contre la maigreur des cyclistes
Cédrine Kerbaol est de cet avis, elle qui vient de créer un compte Instagram nommé F.e.e.d_powr (Fueling for Endurance, Energy, and Durability) afin de mettre en garde les jeunes athlètes contre la perte de poids excessive. Selon elle, l’idéal est d’obtenir un bon équilibre, d’avoir une connaissance globale de la nutrition et de son corps, et de se sentir bien dans sa tête avant les courses. « Je ne pense pas que suivre des calculs aide à bien grimper, je ne pense pas que ce soit indispensable », insiste -t-elle.
Des problèmes osseux, digestifs, cutanés et psychiatriques à craindre
Pour les spécialistes, cette perte de poids importante des cyclistes n’est pas sans risques. Le médecin de l’équipe Cofidis Mathieu Muller relève qu’« une masse grasse trop faible entraîne ce que l’on appelle la triade de la sportive, c’est-à-dire le déficit d’apport énergétique qui conduit à l’absence de règles et ensuite à de l’ostéoporose ». Ce problème pourrait conduire à la longue à une fracture des cervicales et à la paraplégie. « La conséquence, ce sont des problèmes osseux, digestifs, cutanés et psychiatriques, comme de la dépression », ajoute le docteur. Il note que ces risques n’existe pas chez les hommes, chez qui on voit également des coureurs maigres comme le vainqueur du Tour en 2025 Tadej Pogacar.
Des recommandations pour éviter la maigreur des cyclistes lors du Tour de France
Mais alors, que doivent faire les cyclistes féminins ? Les médecins leur conseillent de s’affûter pendant quelques semaines, car au-delà d’une certaine durée cela devient très problématique d’un point de vue médical. Idéalement, les coureuses devraient se fixer deux ou trois objectifs (courses) par saison et le reste de l’année reprendre absolument quelques kilos pour pouvoir miser sur le long terme. D’autres spécialistes de la nutrition plaident pour imposer une masse grasse minimum et interpellent l’UCI sur la nécessité de mettre en place un protocole pour protéger les athlètes d’une maigreur extrême.
