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Tour de France féminin : des primes en hausse

Paul Seixas

Paul Seixas

Pauline Ferrand-Prévot a marqué l’édition 2025 du Tour de France féminin par sa domination sans partage. Deux victoires d’étape, un maillot jaune conservé jusqu’à l’arrivée à Châtel, et une impression de facilité dans les cols. Pourtant, derrière l’exploit sportif, une autre réalité demeure : celle d’une rémunération toujours à la traîne par rapport à celle des hommes. Si les primes versées cette année sont en hausse, elles rappellent l’écart structurel encore très marqué entre les deux versions de la Grande Boucle.

Une enveloppe globale en progression, mais un rapport de 1 à 10

Les organisateurs du Tour féminin ont revu leur copie cette année, avec une enveloppe totale de 259.430 euros pour récompenser les performances sur les neuf jours de course. Un chiffre en hausse par rapport à 2024, qui illustre une volonté d’accompagner la professionnalisation du cyclisme féminin.

Mais cette progression reste modeste à l’échelle de l’épreuve masculine, dont les 21 étapes ont généré une redistribution de 2,3 millions d’euros. Le différentiel reste donc de près d’un facteur 10, comme l’illustre la comparaison directe entre les deux maillots jaunes de juillet : Tadej Pogacar, vainqueur du Tour masculin, a perçu 628.030 euros, contre 61.050 euros pour Pauline Ferrand-Prévot.

Une différence qui reflète encore la disparité des ressources entre les deux circuits, qu’il s’agisse des droits télévisés, du sponsoring ou des dotations fournies par les organisateurs.

Ferrand-Prévot en tête, Squiban s’invite sur le podium

Avec son sacre, Ferrand-Prévot a logiquement raflé la mise sur cette édition 2025. Outre la prime de 50.000 euros pour la victoire finale, elle a engrangé deux fois 4.000 euros pour ses succès d’étape, et quelques milliers d’euros supplémentaires pour ses arrivées dans le top 10. Total : 61.050 euros. Un pactole conséquent dans le peloton féminin… mais qui, une fois partagé avec les coéquipières et le staff, s’amenuise rapidement.

Demi Vollering, deuxième du classement général, suit avec 33.560 euros. La Néerlandaise, toujours présente dans les moments décisifs, confirme son statut de valeur sûre du circuit.

Mais la belle surprise vient de Maëva Squiban. Encore peu connue du grand public, la coureuse bretonne de l’équipe FDJ-Suez a marqué les esprits avec deux victoires consécutives en montagne. Résultat : 14.220 euros de primes et une notoriété grandissante. Un signe que les performances individuelles peuvent rapidement redessiner la hiérarchie… mais aussi un rappel que seuls les résultats exceptionnels permettent de s’approcher d’un niveau de rémunération décent.

Des primes aux multiples critères

Comme chez les hommes, les primes ne récompensent pas uniquement le classement général. Les victoires d’étapes, les maillots distinctifs (meilleure sprinteuse, grimpeuse, jeune, etc.), les passages de cols en tête, ou encore les prix de la combativité viennent s’ajouter à l’équation.

Ainsi, Lorena Wiebes, maillot vert et double vainqueure d’étape, empoche 13.950 euros. La Polonaise Katarzyna Niewiadoma, lauréate de l’édition 2024, enregistre 13.000 euros. Kim Le Court, un temps maillot jaune, s’en sort avec 10.600 euros, juste devant Marianne Vos, victorieuse à Plumelec (10.570 euros).

Mais comme dans tout sport d’équipe, ces primes ne sont pas uniquement conservées par les athlètes qui les remportent. Elles sont en général partagées entre l’ensemble de l’équipe : coéquipières, directeur sportif, mécaniciens, soigneurs… Une tradition qui soude le collectif mais limite, mécaniquement, le bénéfice individuel.

Une inégalité durable ou transitoire ?

L’écart de rémunération entre les pelotons masculin et féminin reste un sujet sensible, souvent justifié par des logiques économiques : audience, sponsoring, revenus générés. Mais cette logique circulaire — qui veut que l’investissement suive l’intérêt, sans jamais le précéder — est aujourd’hui remise en cause par nombre d’acteurs du monde du cyclisme.

La croissance du cyclisme féminin ces dernières années est indéniable. L’audience des grandes courses progresse, les équipes féminines se structurent, et les sponsors s’y intéressent de plus en plus. La présence de diffuseurs internationaux et l’organisation de retransmissions en direct sont aussi des marqueurs positifs.

Mais pour franchir un nouveau cap, beaucoup estiment qu’un effort doit venir aussi d’en haut : en augmentant progressivement les dotations et en réduisant les écarts les plus flagrants, les organisateurs pourraient accélérer la dynamique et renforcer l’attractivité du cyclisme féminin.

Vers un avenir plus équitable ?

À moyen terme, l’équité parfaite entre les Tours masculin et féminin reste difficilement envisageable. Mais une convergence progressive, portée par une politique volontariste, pourrait faire du Tour de France féminin un rendez-vous aussi prestigieux que son pendant masculin.

Le succès sportif et populaire de cette édition 2025, dominée par Ferrand-Prévot mais aussi marquée par des surprises comme Squiban ou Le Court, montre que le potentiel est bien là. Il ne reste plus qu’à l’accompagner jusqu’au sommet.