À quelques jours du départ du Tour de France, un coureur jette l’éponge, incapable de retrouver son niveau après une succession de chutes et de galères physiques. Un renoncement difficile mais lucide, dicté par un principe simple : « Y aller juste pour finir, ça ne sert à rien. »
Le traumatisme du Tour de France 2024 encore présent
L’année dernière, il avait vécu un véritable cauchemar sur les routes du Tour de France. Classé 65e, exténué physiquement et mentalement, il avait traîné ce qu’il décrit lui-même comme « sa misère pendant trois semaines ». Une expérience marquante, presque traumatisante, qui a laissé des traces dans son esprit autant que dans son corps.
Il avait pourtant su rebondir en fin de saison avec une solide sixième place sur le Tour d’Espagne, preuve qu’il n’était pas à court de ressources. Mais 2025 s’est ouvert sous un ciel bien plus sombre. Quatre chutes en quatre mois ont anéanti ses ambitions, l’obligeant à courir après une forme qui ne revient pas.
Quatre chutes en quatre mois : la série noire
Sa descente aux enfers a commencé de manière presque absurde : un chat sur la route lors d’un entraînement hivernal, et une première chute. Ensuite, tout s’enchaîne sur les routes italiennes : les Strade Bianche, puis Tirreno-Adriatico où il se fracture la main, et enfin le Giro en mai, marqué par une profonde entaille à cette même main. À chaque fois, il doit s’arrêter, soigner, récupérer. Mais le corps ne suit plus.
« Une hécatombe », résume-t-il avec amertume. À force de retards accumulés, de douleurs persistantes et d’un manque cruel de continuité, il confie être entré dans un cycle infernal : celui où l’on « court après la forme, tout le temps ».
L’espoir entretenu… jusqu’au bout du Tour de France
Malgré tout, il a tenté d’y croire. À la fin du Tour d’Italie, terminé « complètement cuit », il garde l’envie d’être au départ du Tour. Il se donne une semaine pour repartir en stage, refaire du travail spécifique en montagne, retrouver des sensations. Mais rien n’y fait.
« Les sensations ne sont toujours pas bonnes », confie-t-il. Et les raisons de ce blocage restent floues. Les examens médicaux n’ont rien révélé d’anormal. « Tout est bon, tout est normal », affirme-t-il, comme si l’absence de diagnostic précis ne faisait qu’amplifier son désarroi.
Un choix de raison
Dans ces conditions, la décision s’impose d’elle-même : ne pas prendre le départ du Tour de France. Non pas par dépit, mais par respect pour lui-même, son équipe, et la course.
« Y aller juste pour finir, ça ne sert à rien », martèle-t-il. Pas question de revivre l’enfer de l’an passé, ni de s’accrocher à une illusion. Le Tour est une épreuve qui ne pardonne pas. Mieux vaut s’effacer que de monter sur un vélo sans la moindre garantie de performance.
Ce choix, difficile mais réfléchi, témoigne aussi d’une certaine maturité. Celle d’un coureur qui sait ce que coûte le Tour, physiquement et psychologiquement. Et qui refuse d’en faire une traversée du désert de plus.
Et maintenant ?
Le reste de sa saison demeure incertain. Il faudra retrouver une dynamique, peut-être viser une autre course à la fin de l’été ou à l’automne. Mais pour l’instant, l’heure est au repos, au recul, à la reconstruction.
Ce forfait est aussi le reflet d’un cyclisme toujours plus exigeant, où le moindre grain de sable peut enrayer la machine. Une blessure, un imprévu, et toute la préparation s’effondre. Dans ce contexte, le courage ne réside pas seulement dans l’effort, mais aussi dans le renoncement, lorsqu’il est guidé par la lucidité.
Dans un peloton où la douleur est souvent tue et le surmenage banalisé, oser dire « non » au Tour, c’est peut-être, paradoxalement, une forme de victoire sur soi.