Impérial sur les routes du Dauphiné, Tadej Pogacar a survolé l’épreuve sans jamais sembler forcer. Mais derrière la performance brute, le ton du Slovène et certains de ses gestes ont suscité des critiques, jusqu’à interroger son respect envers ses adversaires, à commencer par Jonas Vingegaard.
Dimanche dernier, Tadej Pogacar a ajouté une ligne de plus à son palmarès déjà étoffé en s’imposant sur le Critérium du Dauphiné. Avec près d’une minute d’avance sur Jonas Vingegaard — pourtant en rodage mais toujours perçu comme son principal rival — le Slovène a imposé sa loi sur les hauteurs alpines. Pourtant, à l’issue de la course, ce n’est pas tant sa supériorité physique qui faisait débat, que son attitude. Une forme de désinvolture qui interroge, voire irrite.
Une domination assumée de Tadej Pogacar, mais trop décontractée ?
À 26 ans, Pogacar a l’habitude des succès éclatants. Mais cette fois, certains observateurs ont noté un changement de ton, presque moqueur. « Je voulais finir vite pour pouvoir regarder ma femme courir au Tour de Suisse », a-t-il lancé après son triomphe lors de la 6e étape. Un clin d’œil à Urska Zigart, également cycliste professionnelle, mais qui a été perçu par beaucoup comme une façon de minimiser l’enjeu ou, pire, de rabaisser ses adversaires.
Une remarque anodine ? Pas pour tout le peloton. D’autant que sur le vélo, Pogacar n’a cessé de sourire, d’attaquer avec facilité, et de relâcher l’effort dans les derniers kilomètres comme s’il participait à une simple sortie d’entraînement. À l’image d’un champion qui s’amuse, mais aussi qui semble au-dessus de la mêlée. Un sentiment partagé jusque dans les rangs de ses concurrents.
Vingegaard dans l’ombre, les tensions en toile de fond
Jonas Vingegaard, encore en phase de reprise après sa chute au Pays Basque, a terminé deuxième du général. Loin derrière sur le plan chronométrique, mais surtout sans pouvoir vraiment rivaliser. Si le Danois ne s’est pas exprimé publiquement sur l’attitude de Pogacar, l’atmosphère entre les deux hommes apparaît de plus en plus tendue à l’approche du Tour de France. Une tension que plusieurs consultants ou anciens coureurs ont relevée.
Pour certains, comme Jérôme Pineau, l’attitude du Slovène frôle la provocation. « Pogacar est un immense coureur, mais il a intérêt à rester dans l’humilité », a glissé l’ancien professionnel sur RMC. « Il est en train de s’isoler. » D’autres y voient simplement le panache d’un coureur libre, qui casse les codes et refuse la langue de bois.
Tadej Pogacar miserait sur l’art de la guerre psychologique ?
Les critiques, Pogacar les connaît bien. Lui-même l’a rappelé dans une interview : « On dirait que certains n’aiment pas que je gagne facilement. » Mais au-delà de sa manière de s’exprimer, c’est peut-être sa stratégie qui dérange. En roulant fort dès les premières rampes, en écrasant ses adversaires sans retenue, il envoie un message clair : il est prêt, dès maintenant. À la différence d’un Vingegaard encore incertain, Pogacar ne laisse aucune place au doute. Une forme d’intimidation sportive, dans la pure tradition des grands leaders.
Vers un duel sous haute tension sur le Tour
Le Tour de France approche, et avec lui la promesse d’un duel au sommet. Entre un Pogacar en pleine forme et un Vingegaard en quête de certitudes, la rivalité promet d’être électrique. Mais pour l’instant, c’est le Slovène qui mène la danse. Trop facilement peut-être.
Reste à savoir si cette attitude, teintée d’arrogance pour certains, assumée pour d’autres, finira par se retourner contre lui. Car dans le cyclisme comme ailleurs, la frontière entre assurance et suffisance est parfois bien mince.