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Romain Bardet tire sa révérence : l’hommage d’un peloton à l’un des derniers romantiques du cyclisme

À 34 ans, Romain Bardet dispute sa dernière course professionnelle lors du Critérium du Dauphiné. Parti de sa ville natale de Brioude, l’Auvergnat reçoit une pluie d’éloges d’un monde du vélo qui salue un coureur à part.

C’est une page du cyclisme français qui se tourne. Ce mardi, sur les routes de Haute-Loire, le peloton s’élance depuis Brioude, mais dans une ambiance toute particulière. Car c’est aussi là, dans cette ville aux reliefs familiers, que Romain Bardet dispute la dernière semaine de sa carrière professionnelle. À 34 ans, celui qui incarna pendant plus d’une décennie l’élégance et la bravoure à la française s’apprête à raccrocher le vélo, non sans émotion. Le monde du cyclisme, ses équipiers, ses adversaires, mais aussi des milliers de passionnés, saluent aujourd’hui un coureur unique, viscéralement attaché à son sport et à ses racines.

Un départ symbolique, au cœur de l’Auvergne

Difficile d’imaginer un scénario plus fort en symboles. Pour cette troisième étape du Critérium du Dauphiné, le peloton s’élance de Brioude, commune auvergnate de 6 500 habitants où Bardet a grandi, découvert le vélo et fait ses premiers kilomètres de grimpeur. Là où tout a commencé, la boucle se referme.

Depuis le week-end, les hommages se multiplient autour de lui. Et pas seulement pour la longévité d’une carrière débutée en 2012, mais aussi pour ce que Bardet a représenté : un coureur offensif, réfléchi, souvent brillant, toujours respectueux, et profondément humain. Sur les réseaux sociaux, dans les colonnes des journaux ou au micro des radios, les mots sont sincères : « idole », « monument », « coureur inspirant ».

Le respect unanime du peloton

« Il a fait une superbe carrière et c’est un grand coureur », glisse Lenny Martinez, jeune talent français de 21 ans qui admire Bardet comme une figure tutélaire. Pour Guillaume Martin-Guyonnet (Groupama-FDJ), 32 ans, pas de doute : « C’est un monument du cyclisme français. Il aura marqué son temps. » Une reconnaissance qui dépasse les frontières : dans le peloton international, Romain Bardet est connu pour son éthique, sa droiture et sa passion du vélo.

Cette reconnaissance, il la doit à ses résultats, mais aussi à son style. Deuxième du Tour de France 2016, troisième en 2017, quatre victoires d’étapes sur la Grande Boucle, des places d’honneur sur les plus grandes courses à étapes, et un panache toujours intact. Bardet n’a jamais été un suiveur, encore moins un calculateur. À une époque dominée par les watts et les stratégies d’équipe millimétrées, il fut l’un des derniers à incarner une forme de romantisme à l’ancienne, où l’attaque prime sur l’attente.

Un dernier baroud à sa manière

Lundi, lors de la deuxième étape du Dauphiné, le Français a tenté une échappée à 20 kilomètres de l’arrivée. Une ultime offensive, comme pour rappeler ce qui l’a toujours défini. « J’ai roulé sur la dernière ascension, la Côte de Nonette, ces 25 dernières années », a-t-il confié sur le site de son équipe Picnic PostNL. « C’était une bonne occasion pour tenter ma chance une dernière fois. » L’histoire ne s’est pas conclue par une victoire, rattrapé qu’il fut par le peloton avant le sprint final, mais peu importe : le symbole est intact.

Sur cette dernière semaine de course, Bardet ne vise pas un classement général. Il veut profiter, sentir l’air du peloton une dernière fois, saluer les fans qui l’ont soutenu toutes ces années. À Brioude, Clermont-Ferrand, Issoire ou ailleurs, c’est tout un territoire qui salue son champion. Un coureur qui n’a jamais oublié d’où il venait.

Un avenir tourné vers la transmission

Et après ? Romain Bardet n’a jamais caché son goût pour l’analyse, la stratégie, les sciences humaines et le sport au sens large. Diplômé en management du sport, passionné d’histoire et de littérature, le Français a de nombreuses cordes à son arc. Il pourrait bien continuer à œuvrer pour le cyclisme, dans un rôle de conseiller, d’ambassadeur ou d’encadrant. L’idée de transmettre ce qu’il a appris, vécu, compris, semble naturelle pour un coureur aussi réfléchi.

En attendant, le rideau va se baisser. Et avec lui s’éloigne l’un des derniers visages familiers du cyclisme tricolore de la décennie 2010. Un homme qui, sans jamais soulever le maillot jaune à Paris, a conquis bien plus que des podiums : l’estime, l’admiration, et parfois même l’amour de tout un peuple.

Romain Bardet s’en va, mais son empreinte reste. Sur les routes d’Auvergne, comme dans le cœur de ceux qui aiment le cyclisme.