La Fédération internationale de boxe (World Boxing), encore en phase d’affirmation depuis sa reconnaissance par le Comité international olympique (CIO), s’est retrouvée au cœur d’une controverse. En cause : l’exposition injustifiée et publique d’Imane Khelif, boxeuse algérienne, dans le cadre de sa nouvelle politique de tests de genre obligatoires. Face à l’indignation suscitée, l’instance a été contrainte de faire machine arrière, reconnaissant une atteinte grave à la vie privée de l’athlète.
Une communication désastreuse pour Imane Khelif
Vendredi dernier, World Boxing annonçait le lancement d’une campagne visant à instaurer des tests de genre pour tous les athlètes de plus de 18 ans participant à ses compétitions. Mais au lieu de présenter une mesure générale et réglementaire, l’organisation a mentionné explicitement le nom d’Imane Khelif, championne olympique des moins de 66 kg. Cette exposition a immédiatement déclenché une vague de critiques, notamment en raison de la nature intime et sensible du sujet.
Le président de World Boxing, Boris van der Vorst, a rapidement tenté de rectifier le tir. Il a adressé une lettre d’excuses à la Fédération algérienne de boxe, dans laquelle il reconnaît que la vie privée d’Imane Khelif aurait dû être strictement préservée. Le mal était pourtant déjà fait : la boxeuse algérienne se retrouve une fois de plus au centre d’un débat international sur le genre, qu’elle n’a ni sollicité ni mérité.
Un passif douloureux
Ce n’est pas la première fois qu’Imane Khelif se voit confrontée à ce type de suspicion. L’année dernière déjà, sa participation aux Jeux olympiques de Paris avait été validée par le CIO, après une vérification approfondie qui avait conclu qu’il ne s’agissait pas d’un cas de transidentité. Malgré cela, des doutes persistants continuent de circuler, alimentés par des fuites et des interprétations discutables de tests effectués hors des protocoles internationaux.
En mars 2023, lors des Championnats du monde en Inde, un test génétique aurait indiqué la présence de chromosomes masculins chez la boxeuse. Ce test, commandité par l’IBA — ancienne fédération en charge de la boxe amateure — est contesté à la fois sur la forme et sur le fond. Le CIO, garant des règles d’équité, a rappelé qu’il n’accordait aucune valeur officielle à ce type de résultats lorsqu’ils ne sont pas réalisés dans un cadre médical reconnu.
Un débat éthique et juridique
La décision de World Boxing d’imposer un test génétique PCR à tous ses participants soulève de vives inquiétudes. En voulant garantir l’équité dans la compétition, la fédération entre dans un territoire miné où se croisent médecine, éthique, vie privée et droits humains. L’identification du « sexe à la naissance » comme critère exclusif d’éligibilité ignore les réalités biologiques complexes, tout comme les recommandations récentes de nombreuses instances sportives internationales.
De nombreuses ONG et juristes spécialistes du droit du sport alertent déjà sur les risques d’une telle politique. Le consentement des athlètes, la fiabilité des tests, l’usage qui sera fait des résultats : autant de questions encore sans réponse claire.
L’image de Imane Khelif ternie
En exposant publiquement Imane Khelif dans une affaire aussi sensible, World Boxing a compromis sa propre crédibilité. L’objectif d’instaurer une nouvelle ère dans la gouvernance de la boxe, loin des pratiques opaques de l’IBA, semble mis à mal par cet incident. Pour Khelif, c’est une nouvelle atteinte à sa dignité, elle qui continue de s’entraîner en vue des Jeux de Paris avec la pression médiatique en toile de fond.
L’affaire met en lumière les limites et les dangers d’une réglementation fondée uniquement sur des critères biologiques simplistes. Au lieu de garantir l’équité, elle risque de renforcer la stigmatisation. Dans ce contexte, les excuses publiques ne suffisent pas. Il faudra des actes concrets et une refonte éthique profonde pour restaurer la confiance des athlètes et du public dans le sport de haut niveau.