Alors que le Tour de France 2025 s’achèvera pour la première fois sur un parcours accidenté à travers la butte Montmartre, certains favoris s’inquiètent. Face aux critiques, Jérôme Pineau réplique sans détour : « Si vous avez peur, ne venez pas. »
Une dernière étape qui bouscule les traditions
Le 27 juillet 2025, la dernière étape du Tour de France ne ressemblera à aucune autre. Exit le traditionnel défilé festif vers les Champs-Élysées, place à une véritable étape de course, avec un passage inédit et potentiellement décisif par la butte Montmartre. Un choix fort des organisateurs, qui entendent offrir un final palpitant, digne d’une épreuve qui ne se décide parfois qu’au dernier souffle.
Mais cette nouveauté ne fait pas l’unanimité. Trois des grandes figures du peloton — Remco Evenepoel, Jonas Vingegaard et Wout van Aert — ont publiquement exprimé leur mécontentement, évoquant un « stress inutile », un « risque de chaos » ou encore une rupture avec l’esprit habituel du final parisien. Même Van Aert, dont le profil semble taillé pour ce type d’arrivée, a préféré se joindre à la fronde.
Jérôme Pineau contre-attaque
Sur les ondes de RMC, dans l’émission Les Grandes Gueules du Sport, Jérôme Pineau n’a pas mâché ses mots pour répondre aux critiques. Pour l’ancien coureur et désormais dirigeant d’équipe, le peloton doit assumer les exigences du Tour : « S’il y a des coureurs qui ont peur, qu’ils fassent des Coupes de Belgique. Le Tour de France, ce n’est pas un circuit de démonstration. C’est une course, avec ses difficultés, son stress, ses enjeux. »
Pineau défend bec et ongles l’initiative des organisateurs : « La Butte Montmartre à quelques kilomètres des Champs-Élysées, c’est magnifique. C’est une superbe idée. Le tracé est bien pensé. Les coureurs n’ont qu’à décider eux-mêmes du rythme à adopter. Ils ont toujours cette liberté de faire la course ou non. »
Une tension révélatrice d’un changement d’époque
Les réactions épidermiques de certains coureurs révèlent un autre phénomène : l’évolution de la perception du Tour lui-même. Depuis plusieurs années, les attentes autour des grandes étapes de montagne, des chronos et des arrivées spectaculaires sont de plus en plus fortes. Le final sur les Champs-Élysées, autrefois symbole de l’apothéose festive, est parfois perçu comme une anomalie dans un sport devenu hyper-compétitif.
En intégrant Montmartre, les organisateurs cherchent à maintenir le suspense jusqu’au bout. Pour Vincent Lavenu, autre ancien coureur reconverti dans la direction d’équipe, « le Tour se gagne sur tous les terrains. Et c’est bien de rappeler que la dernière étape peut encore tout changer. »
La mémoire de Laurent Fignon en toile de fond
La défense passionnée de Pineau s’appuie aussi sur la mémoire collective du cyclisme français. « Quand Laurent Fignon perd le Tour 1989 pour huit secondes lors du dernier chrono, personne ne lui a proposé un tour d’honneur. Il aurait préféré ça, oui. Mais le Tour se termine sur la ligne d’arrivée, pas avant. »
Ce souvenir symbolique pèse lourd. Et il donne du crédit à l’idée qu’un final spectaculaire, même inattendu, peut entrer dans la légende. L’ajout de la Butte Montmartre ne serait donc pas une trahison de l’histoire du Tour, mais une continuité dans l’imprévisibilité qui fait la grandeur de cette course.
Un peloton divisé, un Pogacar silencieux
Fait notable : Tadej Pogacar, double vainqueur sortant et favori à sa succession, ne s’est pas exprimé sur le sujet. Silence stratégique ou approbation tacite ? Quoi qu’il en soit, son absence du débat tranche avec les déclarations tonitruantes de ses rivaux.
Selon plusieurs observateurs, Pogacar verrait dans cette dernière étape une occasion supplémentaire d’asseoir sa domination. Puncheur, excellent grimpeur, bon descendeur, il pourrait même en faire un terrain d’attaque surprise si les écarts au général restent serrés jusqu’au dernier jour.
Montmartre, juge de paix inattendu ?
La possibilité que le Tour 2025 se joue sur les pavés et les virages abrupts de Montmartre ajoute du piment. Les organisateurs l’ont anticipé : le profil de l’étape est technique, usant, mais conçu pour éviter les risques majeurs. Pas de descente dangereuse, pas de mur insurmontable, mais une tension maximale en raison de la configuration urbaine.
Si certains redoutent le « chaos », d’autres saluent une prise de risque bienvenue. Le cyclisme, sport d’endurance et de stratégie, n’est jamais à l’abri d’un renversement. Et cette fin de parcours pourrait bien devenir une référence.
Le Tour est une aventure, pas un protocole
En refusant l’idée d’un dernier jour tranquille, les organisateurs du Tour de France affirment une vision du sport où la compétition ne connaît pas de pause. Jérôme Pineau l’a rappelé avec force : « Tant que la ligne n’est pas franchie, rien n’est gagné. »
La Butte Montmartre, avec son parfum de légende et son potentiel dramatique, pourrait bien faire taire les critiques à l’arrivée. À condition, bien sûr, que le peloton ose s’y confronter. Car comme le dit Pineau, « le Tour, ce n’est pas une garden-party ».