La fin d’une carrière sportive est une étape aussi inévitable que brutale pour de nombreux athlètes. Habitués à l’intensité de la compétition, à la rigueur des entraînements et à la reconnaissance du public, ils doivent ensuite affronter un défi de taille : se reconstruire dans un monde sans médailles. Certains deviennent entraîneurs ou consultants, d’autres reprennent leurs études ou changent radicalement de voie. Tous font face à un même enjeu : redonner un sens à leur quotidien.
Un virage parfois difficile à négocier
Arrêter sa carrière, c’est bien souvent tourner une page qui a occupé toute une vie. De nombreux sportifs de haut niveau s’engagent dans leur discipline dès l’enfance, sacrifiant parfois études, vie sociale et équilibre personnel pour atteindre les sommets. Lorsqu’ils raccrochent, souvent entre 30 et 35 ans, ils doivent réapprendre à vivre… autrement.
« C’est comme sauter dans le vide », résume l’ancien nageur Yannick Agnel, aujourd’hui consultant pour France Télévisions. « Du jour au lendemain, vous passez d’un emploi du temps millimétré à une liberté totale, mais aussi à une solitude que vous n’avez jamais connue. » Le vide psychologique peut être d’autant plus fort que la notoriété, l’adrénaline et la reconnaissance s’estompent rapidement.
La transition est parfois brutale. Selon une étude menée par l’INSEP en 2020, près de 40 % des athlètes de haut niveau connaissent une phase de dépression ou de désorientation dans les deux ans suivant leur retraite sportive. C’est pourquoi l’accompagnement à la reconversion devient un enjeu crucial, notamment via des dispositifs proposés par les fédérations ou les instituts du sport.
Se reconvertir, entre continuité et rupture
Beaucoup d’anciens athlètes choisissent de rester dans leur univers d’origine. Les postes d’entraîneur, de préparateur physique, de directeur technique ou de consultant média sont les plus courants. C’est le cas par exemple de l’ancienne judokate Gévrise Émane, devenue entraîneure nationale, ou du skieur Martin Fourcade, très actif dans l’univers sportif en tant qu’ambassadeur des Jeux et membre du Comité olympique.
D’autres se tournent vers les médias. Le parcours de Tony Parker est emblématique : après sa retraite, l’ancien meneur des Spurs est devenu entrepreneur, président de l’ASVEL, mais aussi consultant ponctuel pour Canal+. Même trajectoire pour Laure Manaudou, que l’on retrouve aujourd’hui sur les plateaux de France Télévisions pendant les grandes compétitions de natation.
Mais certains choisissent des voies plus inattendues. L’ex-cycliste Thomas Voeckler a créé sa marque de vin. La gymnaste Marine Debauve est devenue kinésithérapeute. Quant à l’ancien footballeur Vikash Dhorasoo, il a embrassé une carrière artistique et politique. Ces changements radicaux témoignent de la capacité de certains à se réinventer… et de la nécessité de préparer cette transition bien avant la fin de carrière.
Retrouver du sens, un combat d’athlètes
Si la reconversion professionnelle est un enjeu majeur, elle n’est qu’une partie du défi. Car après la fin de la carrière, de nombreux sportifs doivent aussi reconstruire leur identité. « Pendant 20 ans, j’étais “le judoka”, raconte Stéphane Traineau, double médaillé olympique. Quand tout s’arrête, il faut se redéfinir. »
Ce besoin de sens pousse certains à s’engager dans des causes sociales ou humanitaires. L’ex-rugbyman Sébastien Chabal est très impliqué dans des actions en faveur de l’inclusion. L’ancienne boxeuse Sarah Ourahmoune, elle, a fondé une académie sportive pour les jeunes de quartiers défavorisés. Pour d’autres, comme l’ancien footballeur Lilian Thuram, l’engagement prend une forme militante, avec une fondation dédiée à la lutte contre le racisme.
La question de la santé mentale est également centrale. Plusieurs sportifs, dont l’Américaine Simone Biles ou le nageur Michael Phelps, ont évoqué les souffrances vécues après l’arrêt de leur carrière. Ce type de témoignages contribue à briser le tabou et à encourager les instances sportives à mettre en place des cellules d’écoute et de soutien.