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Mads Pedersen, roi du Giro et électron libre du peloton

Maillot rose, trois victoires d’étape en cinq jours, et une personnalité atypique : Mads Pedersen brille sur le Giro 2025 autant par ses performances que par son approche singulière du cyclisme. Focus sur cinq traits qui rendent le Danois incontournable.

Une rivalité fondatrice avec Mathieu van der Poel

Né la même année que Mathieu van der Poel, en 1995, Mads Pedersen partage bien plus qu’un âge avec le phénomène néerlandais. Dès les rangs juniors, leurs trajectoires se croisent. Lors des championnats du monde juniors de Florence en 2013, Pedersen termine deuxième derrière Van der Poel. Quelques mois plus tôt, il avait conquis Paris-Roubaix juniors, au terme d’une saison où chacun comptabilisait douze victoires. Deux prodiges lancés à pleine puissance.

Cette rivalité s’est prolongée chez les élites. En 2019, lors des Mondiaux du Yorkshire, Van der Poel craque dans le final tandis que Pedersen surprend tout le monde pour coiffer le maillot arc-en-ciel à seulement 22 ans. Deux ans plus tard, le Danois l’emporte à Gand-Wevelgem après avoir intelligemment profité du duel stérile entre le Néerlandais et Wout van Aert. Depuis, les joutes se poursuivent, souvent à couteaux tirés sur les Flandriennes. En 2025, Pedersen termine 2e du Tour des Flandres et 3e à Paris-Roubaix, juste derrière Pogacar et, une fois de plus, Van der Poel.

Le refus des stages en altitude

Dans un peloton obsédé par l’optimisation, où les stages en altitude sont devenus quasi obligatoires, Pedersen cultive la différence. Lui préfère l’air du bas, et surtout la chaleur de son foyer. Depuis 2021, il débute systématiquement sa saison à l’Étoile de Bessèges, en France. Une manière d’amorcer ses campagnes de classiques dans un cadre plus familier et plus humain.

« Je ne supporte pas les stages en altitude », expliquait-il en 2024 après une victoire au Dauphiné. « Rester là-haut à ne rien faire à part t’entraîner, ce n’est pas pour moi. J’ai besoin de rentrer, de cuisiner avec ma compagne. Mon bien-être mental est aussi important que le physique. » Une philosophie rare, mais qui ne l’empêche pas de tenir la dragée haute aux Pogacar, Evenepoel et consorts.

Un régime énergétique pour le moins original

À la pointe sur le vélo, Pedersen l’est aussi dans son approche nutritionnelle. Durant le dernier Paris-Nice, où il s’est révélé impressionnant en montagne, il a dévoilé une recette étonnante : une boisson à base de brocoli compressé, mélangée à du bicarbonate de soude, combinée à… une canette de Monster.

« Chaque jour pendant Paris-Nice, je buvais un Monster à trois heures de l’arrivée », expliquait-il dans le podcast Lang Distance. « Les jours pour sprinteurs, je le prenais sans sucre. Et sur les dernières étapes, j’y allais franchement avec la version sucrée. Je peux vous dire que ça envoie. » Une méthode qui détonne dans un cyclisme moderne très codifié, mais qui semble, une fois encore, parfaitement lui convenir.

Un contrat sans fin avec Lidl-Trek

En pleine réussite sur le Giro 2025, Pedersen a par ailleurs officialisé une prolongation de contrat hors normes avec Lidl-Trek : un engagement « à durée indéterminée ». Dans un sport où les transferts sont fréquents, le choix de la fidélité marque. Arrivé dans la structure américaine en 2017, il n’envisage pas d’en partir avant la retraite.

« Je veux gagner un Monument avant la fin de ma carrière, et je suis convaincu que je le ferai avec cette équipe », a-t-il déclaré en marge du Giro. Pour l’instant, il a déjà remporté Gand-Wevelgem à trois reprises, mais lorgne Milan-Sanremo, le Tour des Flandres ou Paris-Roubaix. Vu son niveau actuel, ce rêve n’a jamais semblé aussi accessible.

Le Tour de France sacrifié, la Vuelta en ligne de mire

Alors qu’il aurait pu légitimement prétendre à une place au Tour de France 2025, Pedersen a préféré céder sa sélection à Jonathan Milan, son coéquipier italien. Un choix stratégique et altruiste, dicté par une évaluation réaliste : « Milan a plus de chances que moi de gagner des étapes », avoue-t-il sans détour.

Pas le plus bavard en conférence de presse, où il n’hésite pas à recadrer les questions trop banales, le Danois est en revanche très apprécié au sein du groupe. « À table, on sent que le collectif vit bien grâce à lui », raconte Julien Bernard, l’un de ses coéquipiers. « Il met en confiance, il sublime l’équipe. » Une preuve supplémentaire que le Danois est bien plus qu’un sprinteur ou un puncheur : c’est un vrai leader.

À 29 ans, Mads Pedersen est peut-être au sommet de sa carrière, mais il le fait à sa façon : sans altitude, avec du brocoli, une canette de Monster à la main et une fidélité rare dans le monde du cyclisme. Une singularité assumée, qui fait sa force.