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Jeux olympiques 2036 et 2040 : une course mondiale entre ambitions, lobbying et géopolitique

Alors que les Jeux de Paris ont marqué les esprits et que Los Angeles et Brisbane s’apprêtent à prendre le relais, les éditions 2036 et 2040 attisent déjà les convoitises. Du Moyen-Orient à l’Europe, en passant par l’Inde ou l’Afrique, la bataille d’influence est lancée pour accueillir le plus grand événement sportif de la planète.

Une compétition sans date mais déjà lancée

Officiellement, le Comité international olympique (CIO) n’a encore arrêté aucun calendrier pour désigner les villes hôtes des Jeux Olympiques de 2036 et 2040. Officieusement, la compétition est bel et bien lancée. Car depuis plusieurs mois, les prétendants avancent leurs pions, nouent des alliances, affûtent leur discours et activent leurs relais diplomatiques. Le lobbying s’intensifie, loin des projecteurs, mais avec une redoutable efficacité.

La double attribution de Los Angeles 2028 et Brisbane 2032 a ouvert une décennie très occidentale pour le mouvement olympique, avec une forte présence dans les pays anglo-saxons. Pour 2036 et 2040, le CIO entend diversifier les hôtes et cherche des candidatures solides, stables et ambitieuses. Les intérêts sont multiples, tout comme les enjeux politiques, économiques et symboliques. « Il n’y a pas une région du monde qui ne souhaite pas organiser les prochains Jeux », confiait récemment un membre du CIO à l’issue du congrès de l’instance en Grèce.

L’Europe veut rebondir après Paris

Le succès populaire et organisationnel des Jeux de Paris a ravivé les ambitions européennes. En Allemagne, plusieurs régions travaillent activement sur un projet de candidature. Le pays, qui n’a plus accueilli les Jeux d’été depuis Munich 1972, pourrait déposer un dossier pour 2036, 2040 voire 2044. Le traumatisme lié à l’édition de 1936 à Berlin incite à la prudence, mais l’idée d’organiser des Jeux « de réconciliation » fait son chemin.

De son côté, Londres ne cache plus ses intentions. Dans une interview au Times, le maire de la capitale britannique, Sadiq Khan, a officiellement annoncé son souhait de candidater pour 2040. Son objectif : faire de Londres la première ville à organiser les Jeux Olympiques à quatre reprises, après 1908, 1948 et 2012. Il promet des « Jeux écologiques », sobres et inclusifs. Une ambition renforcée par le savoir-faire britannique en matière d’organisation, mais qui devra convaincre le CIO qu’un retour à Londres est préférable à une ouverture vers de nouveaux territoires.

Madrid, longtemps candidate malheureuse, pourrait également revenir dans la course. Reste à savoir si l’Espagne acceptera de relancer la machine après plusieurs tentatives infructueuses. Le soutien politique, indispensable, est encore incertain.

Le Moyen-Orient, nouvel épicentre de l’ambition sportive

L’édition 2036 pourrait bien marquer un tournant historique si elle était attribuée à un pays du Moyen-Orient. Le Qatar, déjà très actif sur la scène sportive mondiale, et l’Arabie Saoudite, en pleine stratégie d’influence via le sport, se positionnent sérieusement. Le Qatar, qui a accueilli la Coupe du monde de football en 2022 et de nombreux championnats du monde, veut désormais les Jeux. Il deviendrait ainsi le premier pays arabe à accueillir l’événement.

La puissance financière de ces États, alliée à leur capacité à construire rapidement des infrastructures de pointe, constitue un argument de poids. Mais leur candidature suscite aussi des interrogations, notamment sur les droits humains, les conditions climatiques et les libertés publiques. Le CIO, tout en saluant l’enthousiasme de ces pays, devra arbitrer entre expansion géographique et adhésion aux valeurs olympiques.

L’Inde rêve d’un événement planétaire

Autre grand pays émergent, l’Inde ne cache plus son ambition olympique. Portée par une croissance économique soutenue et un poids démographique gigantesque, la nation sud-asiatique veut renforcer son image internationale. Elle serait prête à tout pour décrocher les Jeux de 2036. Le Premier ministre Narendra Modi lui-même a exprimé ce souhait, et les infrastructures de villes comme Ahmedabad ou New Delhi pourraient être mobilisées.

L’Inde pourrait compter sur son influence au sein du G20, sur une diplomatie active, et sur la volonté du CIO d’ouvrir les Jeux à de nouveaux horizons. Mais les défis sont nombreux : pollution, instabilité régionale, capacités logistiques… Le chantier est immense, mais la volonté politique semble là.

L’Afrique à l’aube de son destin olympique

Jamais un pays africain n’a accueilli les Jeux d’été. Une anomalie géographique que le CIO aimerait corriger. L’Afrique du Sud, après avoir manqué de peu l’organisation du Mondial de rugby 2023, pourrait être une candidate crédible pour 2036. Le gouvernement étudie la faisabilité d’un dossier, encouragé par la perspective des Jeux Olympiques de la jeunesse à Dakar en 2026.

L’arrivée de Kirsty Coventry, ancienne nageuse zimbabwéenne et figure respectée du sport mondial, à la tête du CIO pourrait aussi peser. Elle incarne une ouverture vers le Sud global, et milite pour un partage plus équitable des grands événements sportifs. Le symbole serait fort : un continent encore exclu des Jeux deviendrait enfin hôte.

Une décision aussi géopolitique que sportive

Derrière les critères officiels – durabilité, engagement citoyen, faisabilité financière – se cache une réalité bien plus complexe. Le choix d’une ville hôte des Jeux est éminemment politique. Il s’agit d’un équilibre entre continents, régimes, intérêts économiques et équilibres diplomatiques. Dans un monde instable, le CIO veut des garanties de paix et de stabilité à long terme.

Entre anciens et nouveaux candidats, puissances émergentes et grandes démocraties, la course aux JO 2036 et 2040 est donc lancée. Sans date précise, mais avec déjà de nombreux enjeux. Le CIO devra trancher, en pesant les passions sportives autant que les réalités du monde.