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Romane Dicko, l’invincible reine d’Europe

À seulement 25 ans, Romane Dicko a une nouvelle fois prouvé son immense talent. Samedi dernier au Monténégro, la judokate française a décroché son cinquième titre européen en autant de participations, affirmant son statut de référence incontestée dans sa catégorie.

Une revanche sur la douleur des Jeux de Paris

Lorsque Romane Dicko s’est précipitée dans les bras de son père Daniel, l’émotion était palpable. Cette accolade débordante de joie contrastait avec celle, bien plus douloureuse, échangée aux Jeux olympiques de Paris 2024. À l’époque, la médaille de bronze en +78 kg avait laissé un goût amer à la championne du monde 2022, que même le sacre en équipe mixte contre le Japon n’avait réussi à consoler pleinement.

« La douleur est toujours là, elle sera toujours là mais il faut avancer », confie aujourd’hui Dicko. Au Monténégro, elle a su transformer cette cicatrice en énergie positive, en dominant une nouvelle fois l’Israélienne Raz Hershko en finale, par immobilisation. Une troisième victoire consécutive contre cette adversaire en finale continentale, symbole d’une supériorité sans appel.

Une championne forgée par le travail et la ténacité

Romane Dicko n’est pas seulement une judokate talentueuse, elle est aussi l’incarnation de valeurs fortes : travail, détermination, volonté, engagement et sérieux. Ces mots, brodés sur sa ceinture sous l’acronyme TDVES, accompagnent chacun de ses combats.

Son père, Daniel Dicko, présent à chaque compétition, rappelle son incroyable force de caractère. « Elle s’est blessée au doigt il y a huit jours à l’entraînement. Elle aurait pu déclarer forfait, mais elle a préféré continuer. C’est ça, la force de Romane, elle ne lâche jamais. »

Samedi, cette abnégation lui a permis d’intégrer le cercle très fermé des quintuples champions d’Europe français, aux côtés de légendes comme Teddy Riner et Clarisse Agbégnénou.

Un chemin semé d’obstacles et de détermination

Romane Dicko ne laisse rien au hasard. Même hors des tatamis, sa rigueur est impressionnante. À Podgorica, elle a même pris le temps de rafistoler le dossard d’un coéquipier, Joan-Benjamin Gaba, avec sa machine à coudre qu’elle emmène toujours avec elle.

Sur le tapis, sa journée a été quasi parfaite. Seul son duel face à sa compatriote Léa Fontaine, lors des demi-finales, a nécessité un effort supplémentaire. Menée au niveau des pénalités, elle a su inverser la tendance en haussant le rythme pour finalement s’imposer. « Contre une Française, c’est toujours compliqué mentalement. Mais je ne voulais pas que l’arbitre décide du sort du match », a-t-elle raconté.

Cet instinct de championne, capable de se sublimer dans les moments de doute, est salué par Jane Bridge, l’actuelle entraîneure de l’équipe de France féminine. « Quand il faut hausser le niveau et le tempo, Romane sait le faire », souligne-t-elle.

Une transition réussie malgré un changement brutal

Le parcours de Romane Dicko aurait pu être perturbé par le départ forcé de son ancienne entraîneure, Séverine Vandenhende, après les Jeux de Paris. Un coup dur pour la jeune athlète, qui avait exprimé sa reconnaissance envers celle qui l’avait accompagnée durant deux années éprouvantes.

« Sans Séverine, je ne sais pas si j’aurais décroché une médaille aux Jeux », confiait-elle en mars dernier, au moment de sa reprise victorieuse lors du Grand Chelem de Tbilissi. Mais fidèle à son tempérament, Dicko a su rebondir et construire une nouvelle dynamique sous la houlette de Jane Bridge, légende du judo français et première femme championne du monde en 1980.

À Podgorica, Jane Bridge n’a eu qu’à observer une Romane en pleine maîtrise. « À vrai dire, elle n’avait pas besoin de grand-chose aujourd’hui », reconnaît-elle dans un sourire.

Objectif Budapest et au-delà

Avec cinq titres continentaux désormais à son palmarès, Romane Dicko regarde déjà plus loin. Sa prochaine grande échéance sera le championnat du monde à Budapest, du 13 au 20 juin prochain, où elle espère récupérer son titre perdu en 2023.

À 25 ans, celle qui est arrivée au judo en voyant Audrey Tcheuméo glaner le bronze olympique à Londres en 2012 est désormais une source d’inspiration pour toute une génération. Son parcours exemplaire, fait de résilience, de rigueur et d’humilité, la destine à écrire encore de nombreuses pages d’or dans l’histoire du sport français.